Management bienveillant (Rodet, Desjacques 2017 ; Bruyère 2022), management humaniste (Brasseur, Yanat 2010), management alternatif (Barlatier et al. 2017), etc… sont autant d’expressions qui se sont accélérées dans la dernière décennie. Derrière ces appellations variées, c’est une remise en cause des hiérarchies traditionnelles qui est pointé et un besoin de repenser les rapports des acteurs dans les organisations, de développer un « prendre soin » des salariés, des usagers, et de soi, encourageant les entreprises traditionnelles à s’adapter et à se transformer. On constate le développement des entreprises libérées, du télétravail, des équipes autonomes, des espaces de co-working, etc. Ce sont ainsi de nouveaux modes de collaboration, de nouveaux espaces de travail et de nouvelles temporalités qui sont à inventer. Ces évolutions ne sont pas étrangères aux organisations de santé qui n’échappent ni aux contraintes de productivité, ni aux contraintes de qualité, de traçabilité, ou de sécurité. Dans ce contexte d’intensification du travail, les « théories » du care (Gilligan 2008 ; Tronto 2008 ; Molinier, Laugier, Paperman 2009 ; Brugère 2021) posent les fondements d’un care organisationnel ou d’un management qui consisterait certes à organiser le travail pour générer des résultats mais plus encore, à prendre soin du travail (et de ceux qui le produisent) pour atteindre une performance durable. Dans une approche « care », cette performance pourrait se mesurer par la capacité de l’organisation à répondre aux besoins concrets des différentes parties prenantes. Le care comme processus continu invite à penser le travail de manière nécessairement systémique avec des acteurs qui dépendent les uns des autres pour se rendre utiles socialement et économiquement. Le care permet aussi de reconnaître une forme de vulnérabilité dans l’organisation : un manager est un être vulnérable accompagnant et/ou dirigeant d’autres êtres vulnérables. Une étude de cas exploratoire (phase 1), réalisée auprès d’un EHPAD associatif, nous a permis de démontrer que des pratiques managériales centrées sur le « care », plus précisément qui s’inscrivent dans un souci constant de prendre soin des collaborateurs et des usagers et de reconnaitre l’interdépendance de tous quel que soit le niveau hiérarchique, ont créé les conditions favorables à la gestion de crise COVID-19 (Bruyère, Massard, 2021). La reconnaissance de la vulnérabilité de tous (direction, soignants et usagers), la transparence, l’incitation au travail collaboratif et la conduite de projet transdisciplinaire sont autant de dispositions et de pratiques qui font reconnaître aux parties prenantes leur interdépendance. Nous proposons, à travers cette commuication, d’approfondir l’étude de cas (hors période COVID, phase 2) en questionnant et en analysant les dispositifs organisationnels et managériaux en place dans cet établissement centré sur le care, tant vis-à-vis des usagers, des agents que du territoire. Des entretiens semi-directifs sont en cours auprès des différentes parties prenantes (4 entretiens réalisés sur 12 prévus) : conseil d’administration, soignants, usagers, administratifs et direction. L’objectif est ici de comprendre dans quelles mesures les dispositifs managériaux en place contribuent à une performance durable (santé globale), et de questionner les conditions (ou les dispositions) nécessaires au care afin de contribuer aux fondements théoriques du care organisationnel (Meyronin, Grassin, Benavent, 2019 ; Cintas, Zouaghi, Eve, 2023).